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Du Zwin au Westhoek, les charmes verts de la Côte belge

Bétonnée et grise, la Côte belge ? Ce n’est pas complètement vrai ! Le littoral comporte aussi de belles zones préservées. De quoi se ménager de jolies petites sorties entre dunes, prés salés et bosquets vallonnés.

Soixante kilomètres à peine. Arrêts (rapides) compris, il suffit d’une grosse journée d’été pour parcourir l’ensemble du littoral en voiture, de la frontière néerlandaise à la frontière française. L’exercice est facile, et permet de trancher une bonne fois pour toute : la côte belge est-elle vraiment  » moche à pleurer  » comme l’affirmait début d’année l’association néerlandaise pour la nature et l’environnement (Natuurmonumenten) ? N’y voit-on vraiment plus  » aucun paysage de qualité  » ? Certes, on peut difficilement nier que certaines stations balnéaires s’apparentent à de longues lignes d’immeubles sans réel charme. Mais de là à généraliser... Une vérification s’impose !

Les polders de l'arrière-pays ne sont pas sans charme (ici, derrière Zeebruges).
Les polders de l’arrière-pays ne sont pas sans charme (ici, derrière Zeebruges).© BELGAIMAGE

Un aéroport... à oiseaux

A tout Seigneur, tout honneur : puisque que ce sont des Néerlandais qui ont émis un jugement négatif sur le littoral, commençons par la frontière orientale de la  » Belgische kust « , contiguë aux Pays-Bas. De quoi battre en brèche, dès les premiers mètres, l’idée d’un littoral bétonné : notre périple débute en effet... dans la plaine du Zwin ! Pour beaucoup, la mention de ce parc naturel renvoie à des souvenirs anciens de sorties en famille ou avec l’école, aromatisées de tartines au salami tièdes et d’eau de gourde au goût métallique. Premier arrêt, première grosse surprise : entièrement rénové, le Zwin n’a plus grand-chose à voir avec nos souvenirs d’enfance.

Les lieux se présentent désormais comme un  » aéroport international des oiseaux « , panneau des départs et simulateurs de vol compris. Une thématique assez bien exploitée dans l’espace muséal interne récemment inauguré, où chaque visiteur reçoit un passeport lui permettant de s’identifier à une espèce de volatile. A l’extérieur, adieu les cages et l’aspect  » zoo  » d’antan : des espaces naturels ont été recréés – mares et îles de nidification – et offrent de très jolis panoramas dans lesquels se mêlent plans d’eau, roseaux, et flore colorée des prés salés. Des cabanes thématiques sont disséminées ci et là et permettent de participer à des ateliers. Peut-être la visite est-elle moins spectaculaire qu’autrefois : il faut désormais observer les oiseaux de loin, avec des jumelles individuelles (disponibles à l’accueil) ou des longues vues disséminées dans des espaces d’observation. Mais le parti pris en vaut la peine, et les qualités paysagères des lieux en sortent renforcées. A noter que, dans les prochaines années, le Zwin devrait encore évoluer, puisqu’en 2019, la superficie de la réserve naturelle aura doublé !

Il y a des bois le long de la mer ! (Le Coq)
Il y a des bois le long de la mer ! (Le Coq)© WESTTOER

La beauté du gris

Nous reprenons la route vers l’Ouest, tandis que le ciel se couvre rapidement de nuages. Mais la météo avait dit que... Soit. On ne changera plus le climat local. Nous nous éloignons temporairement du bord de mer pour éviter Knocke-Heist,  » la huppée « , et, surtout, le port de Zeebruges. L’occasion de découvrir les charmes de l’immédiat arrière-pays. Aux abords de la réserve du  » Uitkerkse Polder « , quelques centaines de mètres à peine derrière Blankenberge, le paysage se fait joliment mélancolique et semble tout droit sorti d’une chanson de Brel. Sous la lourde grisaille, place aux bouquets d’arbres courbés par le vent, aux prairies infiniment plates, parcourues de fossés et de canaux emplis de roseaux. Aux hautes herbes fouettées par la bruine, qu’on jurerait salées. Ci et là, au loin, de rares fermes semblent s’accrocher à la terre spongieuse. Ne manquent plus que  » les cathédrales pour uniques montagnes  » ! Quoique... tout dépend de l’endroit où on regarde... A défaut de noirs clochers, en nous retournant, nous distinguons les barres grises de la station balnéaire toute proche. Soyons objectifs, les espaces verts de la côte belge ne manquent pas de charme mais ne sont pas sans défauts : assez souvent, des constructions sans intérêt, voire disgracieuses, sont accolées aux beaux panoramas. Pas de quoi gâcher le plaisir – il est facile d’en faire abstraction en tournant simplement la tête de quelques degrés – mais, au niveau de la sensation d’évasion, on repassera.

Des vagues de dunes

Retour à la mer, ou presque. La nationale longeant les rails de ce bon vieux tram nous servira désormais de fil d’Ariane. Le ballast côtier et le sable blond nous font l’effet d’une  » madeleine de Proust « . Tandis que le soleil réapparaît, nous reviennent aussi des sensations de gaufres chaudes, de coquilles de couteaux craquant sous les pieds nus, de fleurs en papier, de crevettes grises décortiquées sur un papier journal. La nostalgie nous rendrait-elle plus clément ? La route nous semble en tout cas bien éloignée de sa caricature de boulevard continuellement bordé de buildings. Nous sommes à hauteur du Coq et longeons un cordon arboré, les Duinbossen ( » les dunes boisées « ). Hé oui, il y a des bois en bord de mer ! Ceux-ci ont été créés artificiellement au début du XIXe siècle et s’avèrent charmants : les pins et les peupliers gardent une dimension modeste et partagent l’espace avec les broussailles d’aubépines, les oyats et des zones ensablées. A leurs abords, on retrouve les jolies villas  » anglo-normandes  » qui font le charme du Coq et ne dépareillent pas l’ensemble.

Les promenades situées face à la réserve de l'Ijzermonding (Nieuport) offrent un bien beau panorama.
Les promenades situées face à la réserve de l’Ijzermonding (Nieuport) offrent un bien beau panorama.© WESTTOER

On se laisserait bien aller à la rêverie, mais la route est encore longue. La ligne des dunes s’amincit et disparaît presque au fur et à mesure que nous nous approchons d’Ostende. Aux abords du Fort Napoléon, nous nous arrêtons un instant sur l’Oosteroever et ses plages calmes qui permettent d’embrasser la ville du regard. Au-delà de la cité balnéaire, sur notre gauche, apparaît le domaine de Raversyde, ancien domaine royal fortifié par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale : au milieu des hautes herbes, c’est aujourd’hui l’une des portions les mieux conservées du Mur de l’Atlantique, où pointent encore les canons des bunkers. On y trouve également un village médiéval en partie reconstitué. Curieux mélange de patrimoine historique et de végétation !

Quelques kilomètres plus loin, nous traversons l’embouchure de l’Yser : on y trouve une réserve naturelle de premier plan,  » De Ijzermonding « , à deux pas du port de plaisance de Nieuport. Comme au Zwin, la flore et la faune ont dû s’adapter à un mélange d’eaux douce et salée, créant de ce fait un biotope particulier. Les lieux ne sont accessibles que dans le cadre de promenades guidées mais un sentier en fait le tour et les parcs sis de l’autre côté du fleuve en offrent un joli panorama. Passé l’Yser, les espaces naturels semblent se faire plus présents : les dunes d’Oostduinkerke, de Coxyde, de Saint-Idesbald et de la Panne gardent un jene-sais-quoi de nature indomptée. Sur les prés sableux de  » Ter Yde « , on retrouve même une population de chevaux sauvages ! A quelques centaines de mètres à peine se trouve la plus haute dune du littoral : le Hoge Blekker  » culmine  » à 33 mètres et, on s’en doute, offre un beau point de vue sur l’arrière-pays et la réserve du Doornpanne. C’est là l’avant-dernière halte d’un voyage épuisant mais éloquent.

La frontière n’est plus loin. Il nous reste encore une pépite à contempler – et un ultime clou à enfoncer dans le cercueil des idées reçues sur un littoral belge, soi-disant intégralement bétonné -, la réserve naturelle du Westhoek. Sur 340 ha d’étendues sablonneuses couvertes de végétation, voici un petit Sahara végétalisé qui n’a rien envier aux paysages côtiers de l’étranger ! Le littoral belge est définitivement beau. Vert et beau. Pas partout, pas tout le temps. Mais c’est peut-être ce qui lui donne son élégance bien à lui !

Du Zwin au Westhoek, les charmes verts de la Côte belge
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Pratique

– Parc naturel du Zwin : Graaf Léon Lippensdreef 8, 8300 Knokke-Heist. www.zwin.be ou 050 60 70 86

– Prés salés du Uitkerkse polder : Centre des visiteurs, Kuiperscheeweg 20, 8370 Blankenberge. www.uitkerkse-polder.be

– Duinbossen, Le Coq – Wenduine : possibilité d’acheter une carte du circuit  » Duinbossen  » à l’office du tourisme du Coq, tramlijn-Oost, 8420 Le Coq. www.visitdehaan.be ou 059 24 21 34

– Domaine provincial de Raversyde, Nieuwpoortsesteenweg 636, 8400 Ostende. www.raversyde.be ou 059 70 22 85

– Réserve naturelle De Ijzermonding, Nieuport. Point de vue possible depuis l’autre côté du fleuve, sur la Robert Orlentpromenade. Informations pour les visites guidées sur www.nieuwpoort.be ou 058 23 39 23.

– Zone de dunes de Ter Yde, Albert I Laan, à proximité du croisement avec la Cottagelaan, 8670 Coxyde. www.natuurenbos.be/teryde.

– Sommet du Hoge Blekker : le point de vue culminant se situe à proximité du 19, Panoramalaan, 8670 Coxyde.

– De Doornpanne : possibilité de suivre un circuit à travers le domaine naturel depuis le centre de visite de Doornpanne, Doornpannestraat 2 à Coxyde. http://koksijde.com.

– Réserve naturelle du Westhoek, Schuilhavenlaan, 8660 La Panne. Carte des sentiers pédestres disponible sur http://tourisme.depanne. be> découvrir> région> Promenades> Réserves naturelles

– Plus d’infos ? Vous trouverez des renseignements sur tous les espaces verts mentionnés ici, ainsi que d’autres, via www.lelittoral.be.

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