Comment gérer des servitudes ?

 » Une servitude est un droit établi sur un immeuble ou un terrain, au profit d’un autre bien « , nous dit le Code civil. Fort bien, mais comment s’établit-elle ? Qui en assure l’entretien ? Peut-on la modifier ou la supprimer ? Où s’informer ?

Contenu :

Différents types
Les plus courantes
Qui fait quoi ?
Une servitude peut-elle prendre fin?
Où s’informer ?

Le petit ruisseau qui coule au fond du jardin, un droit de passage sur le terrain voisin, une canalisation qui traverse votre jardin, les distances à respecter pour les plantations, la fenêtre donnant sur la propriété voisine... tous ces faits ont un point commun : ce sont des servitudes. Une servitude établit un droit sur un bien (appelé fonds servant) au profit d’un autre bien (fonds dominant). Chaque propriétaire doit la respecter, que ce soit pour en supporter les conséquences (servitude passive) ou pour en profiter (servitude active). Une servitude est donc attachée à un bien immeuble et non à son propriétaire. D’où cet adage  » les propriétaires changent, mais les servitudes restent « .

Différents types

S’il existe une multitude de servitudes, il est quand même possible de les classer en différentes catégories suivant leur origine.

Les servitudes naturelles : elles dérivent de la situation naturelle des lieux. Exemple : un petit ruisseau coule au fond de votre jardin. Vous devez respecter la situation et vous ne pouvez pas détourner ce ruisseau.

Les servitudes légales : dérivées des obligations légales, elles se subdivisent en :

  • servitudes d’intérêt public : on trouve, par exemple, dans cette catégorie, les canalisations souterraines d’eau, de gaz, le passage d’une ligne à haute tension...

Attention ! Ces servitudes ne figurent pas dans le titre de propriété du vendeur, ni dans le compromis de vente : il est vivement conseillé de se documenter avant de signer le compromis (voir : Où s’informer ?)

BON à SAVOIR La création d’une servitude d’utilité publique n’entraîne pas d’expropriation, mais limite votre droit de propriété. De ce fait, vous avez droit à une indemnité proportionnelle au préjudice subi. S’il est vraiment très important, vous pouvez même demander que l’autorité publique acquière votre bien.

  • servitudes d’intérêt privé mais qui sont organisées par les règlements publics. Ainsi, le Code rural dicte les distances à respecter pour les plantations par rapport à la limite de propriétés voisines.

Les servitudes  » établies par le fait de l’homme  » se divisent en deux groupes :

  • les servitudes contractuelles : des propriétaires voisins peuvent créer des servitudes par contrat établi entre eux. Pour qu’il soit connu et respecté de tous, mieux vaut mieux le faire rédiger par un notaire et transcrire au bureau des hypothèques.
  • les servitudes par prescription : des servitudes peuvent naître par prescription de 30 ans. Il doit toutefois s’agir d’une servitude apparente (visible à l’£il nu) et continue (la présence d’une fenêtre dans un mur, par exemple). Si une telle situation est tolérée plus de 30 ans, une servitude naît et on ne pourra plus exiger d’y mettre fin.

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Les plus courantes

Elles concernent principalement la vue sur les propriétés voisines, le mur mitoyen, les plantations et le droit de passage.

Les jours et les vues

Cette servitude rappelle qu’il est interdit de plonger directement du regard dans le bien de son voisin. Le Code civil fait une distinction entre les vues et les jours : les vues s’ouvrent et laissent passer l’air et la lumière (comme une fenêtre ouvrante). Les jours, ne s’ouvrent pas et laissent uniquement passer la lumière. Trois situations peuvent se présenter :

  • on peut pratiquer des vues si le mur est situé à une distance minimale, fixée par la loi à 1,90 m pour les vues droites et les balcons et à 60 cm pour les vues obliques
  • si le mur est jointif (il touche au bien voisin sans être mitoyen), vous ne pouvez y pratiquer que des jours qui doivent en outre être établis à une certaine hauteur au-dessus du sol de la pièce : 2,6 m pour le rez-de-chaussée et 1,9 m pour les étages.
  • si le mur est mitoyen, vous ne pouvez pratiquer ni vue ni jour sans le consentement du voisin.

Le mur mitoyen

En accord avec votre voisin, vous pouvez décider d’ériger une séparation à cheval sur la ligne qui sépare vos propriétés. Dans les villes et les banlieues (mais pas à la campagne), vous pouvez obliger votre voisin à participer financièrement à la construction ou à la réparation d’un mur en pierre... à condition d’exercer ce droit avant d’entamer les travaux. Autrement dit, vous ne pouvez pas construire (ou réparer) un mur mitoyen et puis solliciter votre voisin.

BON à SAVOIR Ce n’est pas parce qu’une maison se construit à côté de la vôtre que le mur de séparation existant devient mitoyen. Ce ne sera le cas que si votre nouveau voisin y accole sa maison, son garage... Vous pourrez alors lui réclamer une contribution financière égale à la moitié de la valeur du mur (et de ses fondations) ou de la partie réellement utilisée.

Les plantations

Le Code Rural fait une distinction entre arbres à haute et arbres à basse tige. Les arbres à haute tige doivent être plantés à 2 m de la limite entre les propriétés tandis que les arbres à basse tige ne doivent être distants que de 50 cm de cette limite. Si cette distance n’est pas respectée, le voisin est en droit d’exiger l’abattage de l’arbre sauf s’il est planté depuis plus de trente ans (voir ci-dessus : servitudes par prescription).

Si vous êtes obligé d’abattre un arbre à haute tige, vous devez demander un permis d’urbanisme.

BON à SAVOIR Il existe un droit de passage qui vous permet d’aller sur le terrain du voisin afin d’élaguer vos arbres : c’est ce qu’on appelle le  » droit d’échelle « .

Attention ! Les règles décrites ci-dessus sont d’ordre général et il peut exister des règlements communaux et des usages locaux qui y dérogent. Il est possible de prendre connaissance de ces derniers auprès du greffe de la justice de paix du lieu où se situe le terrain.

Le droit de passage

Un droit de passage est octroyé lorsqu’un fonds (bien) est enclavé, c’est-à-dire lorsqu’il n’a pas d’accès direct (suffisant) à la voie publique. Le propriétaire de ce fonds est en droit de réclamer un passage sur un des biens voisins moyennant une indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner. Le montant de cette indemnité est déterminé de commun accord ou par le juge.

En principe, le droit de passage doit être exercé du côté où le trajet est le plus court sauf s’il existe un autre trajet qui entraînera moins de dommages pour le voisin.

Le droit de passage peut être demandé à tout moment. En effet, la notion de » bien enclavé  » peut évoluer dans le temps et en fonction de la destination de ce bien, et un bien peut maintenant être considéré comme enclavé alors qu’il ne l’était pas auparavant. Exemples : jadis, l’exploitation d’un terrain agricole se faisait par des chevaux qui pouvaient passer par un sentier. Le terrain n’était pas considéré comme enclavé, alors qu’actuellement, son exploitation se fait à l’aide de gros engins agricoles qui ne peuvent plus emprunter le sentier. Il peut donc désormais être considéré comme enclavé.

En cas d’accord, les voisins peuvent évidemment établir par convention toute servitude de passage en fixant l’étendue et les modalités de celle-ci.

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Qui fait quoi ?

Les frais de création et d’entretien d’une servitude de passage sont normalement à la charge de celui qui en profite, sauf si les voisins décident entre eux d’une autre répartition. Le propriétaire du bien qui bénéficie d’une servitude de passage peut évidemment en profiter mais ne peut rien faire pour aggraver la situation de l’autre immeuble. Le propriétaire du bien sur lequel se fait le passage ne peut, lui, rien faire pour réduire l’usage de la servitude.

La mitoyenneté est en quelque sorte une forme de copropriété forcée. Elle naît le plus souvent de la construction à frais communs d’une clôture, d’une haie, d’un mur... Chacun des copropriétaires doit contribuer pour moitié aux charges occasionnées par la construction de la clôture mitoyenne. Les réparations nécessaires au bon entretien de la clôture sont aussi à frais communs.

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Une servitude peut-elle prendre fin?

En principe, une servitude est éternelle, mais elle peut aussi s’éteindre principalement pour les raisons suivantes :

  • elle n’est plus utilisée par le bénéficiaire pendant 30 ans
  • un acte, un obstacle a empêché l’utilisation de la servitude (par exemple, une barrière fermant le chemin qui permettait le passage) et cette entrave n’a pas été contestée pendant 30 ans
  • elle n’est plus d’aucune utilité : par exemple, le propriétaire a acheté le terrain sur lequel il bénéficiait d’un droit de passage
  • le bénéficiaire de la servitude renonce à son droit de manière implicite ou formelle (par acte notarié).

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Où s’informer ?

Les servitudes sont plus fréquentes qu’on ne l’imagine souvent. En outre, elles se transmettent au nouveau propriétaire en cas de vente du bien. C’est donc un poste qu’il ne faut pas négliger si vous envisagez l’achat d’un bien existant.

1. Commencez par ouvrir l’oeil lorsque vous visitez le bien et regardez s’il y a des servitudes apparentes (fenêtres, sentier...).

2. Interrogez l’agent immobilier et le vendeur. L’agent immobilier doit s’informer de l’existence de servitudes et vous en informer. Le vendeur doit, lui aussi, vous avertir. S’il ne le fait pas et que vous n’auriez pas acheté si vous aviez été au courant de cette servitude, vous pouvez réclamer un dédommagement ou faire annuler la vente. Sauf... s’il s’agit d’une servitude apparente que vous auriez normalement dû voir ou d’une servitude légale dont vous auriez dû être informé.

3. Le notaire a pour mission d’informer le candidat acheteur le plus complètement possible, y compris sur les éventuelles servitudes.

4. La commune peut, de son côté, vous informer sur les servitudes d’utilité publique (conduites souterraines, par exemple).

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